Été 1984...Adolescents nous abordons les vacances scolaires sous l'angle de
la glande et de parties de foot sans enthousiasme pendant les deux mois à
venir. Seule perspective de changement : la rentrée. Ayant récupéré une caméra
Super 8 laissée par mon père lors de l’un de ses passages, je soumis l'idée de
tourner un film, un vrai, de quoi nous occuper une bonne partie de l’été.
A
cette époque, le matériel vidéo était inabordable et peu concluant, seul le
support film avait encore cette possibilité de nous permettre de nous
“exprimer”. Il suffisait de détourner son principe premier d’appareil photo
amélioré (Fais coucou à la caméra!) pour faire de cette Bauer S108 un véritable
outil de créativité. J’achetais donc des Kodachrome 40 sur lesquelles les deux
pistes son nous permettaient également d’envisager, en plus de la captation des
voix, le rajout d’une musique additionnelle.
Les premières réactions ne se firent pas attendre et chacun y alla de sa
bonne idée...Tout a été envisagé, du plus simple au plus compliqué, mais,
curieusement, rien qui ne tourne autour d’un drame familiale ou d’une relation
amoureuse perturbée avec horloge normande en fond sonore.
Après d'âpres discussions nous nous accordâmes finalement pour un film
d'aventure dans la droite ligne des AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE. Grande
ambition pour petits moyens mais cela restait à notre portée.
A ce stade pas de
scénario mais une continuité plus ou moins élaborée en fonction des désirs de
chacun... Désirs qu'il fallut combler au fur et à mesure des aléas de cette
petite production. Stéphane Vail choisit le rôle de l'intrépide baroudeur
grande gueule, qui lui correspondait parfaitement. Mon frère aîné Marc, fidèle à son habitude choisit le rôle le plus court pour ensuite s'intéresser à la
caméra et me piquer mon job. Ainsi fut fait (il était plus grand et plus fort) et il
interpréta la première victime. Éric Basset, sportif accompli, endossa
logiquement le rôle principal, ce qui finalement arrangea tout le monde. Quant
à moi, je devins le bad guy, l'homme possédé par la statuette
et qui élimine un par un les membres de l'expédition.
Affiche par Marc E. Clément |
Mais laissez-moi vous résumer l’histoire : tout commence par l'assassinat
d'un archéologue par une bande de bras cassés pour s'emparer d’une carte censée
indiquer l’emplacement d’un trésor en Amazonie (sic!). Aussitôt rendus sur
place ils font l’amère constatation que le trésor est en fait une simple
statuette ornée d’un bracelet de peu de valeur. L'un des membres de
l'expédition passe le bracelet à son poignet et se retrouve possédé par
l’esprit de l’idole. Bien malgré lui, manipulé, il se retourne violemment
contre ses acolytes pour les empêcher de quitter la jungle. Débute alors un jeu de chats et de souris pour la survie de chacun...
En fait de jungle Amazonienne, nous avons tourné dans les douves de
l'ancien château de notre village. Douves rénovées depuis mais qui à l'époque
étaient un fouillis de branchages et de lierres enchevêtrés, dans lesquels se
distinguaient encore quelques restes du château que nous recyclâmes comme
ancien temple voué au culte de la statuette. Quelques torches bien placées sous une arche et le tour était joué.
Le tournage s’effectua non sans mal et le désengagement de l’un des
protagonistes nous obligea à retourner l’intégralité de certaines scènes. Ce
qui nous troua les poches car les 3 minutes de film des cartouches Kodak
n’étaient pas données. Aussi nous fallait-il tourner au plus juste, 2 prises
maximum et si la première était la bonne, on s’en contentait.
Notre intérêt reposait essentiellement sur les scènes de meurtre et
Stéphane ne se fit pas prier pour envisager les cascades les plus folles et les
plus irresponsables. Pour exemple je prendrai la scène au cours de laquelle il
est censé prendre feu. Nous n'avions rien trouvé de mieux (à sa demande) que
de l'asperger de white spirit et d'allumer. Par mesure de précaution nous avions emprunté un extincteur de voiture qui,
à notre grande surprise, ne pouvait servir qu'une seule et unique fois.
Stéphane s'embrasa (bien modestement fort heureusement), et nous éteignîmes les
flammes avec l'extincteur qui ne put s'arrêter et se vida entièrement. Stéphane
ne mourut pas carbonisé mais faillit s'étouffer avec la poudre. Petit à petit
celle-ci s'étendit sur tout le périmètre et blanchit toute la flore et nous
avec...Tout le monde se retrouva pris d'une quinte de toux épouvantable. Pour
éviter les remontrances, nous remîmes l'extincteur en place sans piper mot de
quoi que ce soit, en espérant que nul n'aurait jamais besoin de l'utiliser un
jour.
Cette scène lamentable marqua la fin du tournage estival de LA MALÉDICTION
DE LA STATUETTE. La rentrée des classes interrompit le film, et nous n'eûmes
plus jamais l'occasion d'y revenir par manque de temps, de disponibilité et de
motivation.
Reste un montage de près de 12 minutes, mixé et sonorisé, dont les scènes
ratées mises bout à bout à la fin du métrage ont généralement plus de succès
que le film lui-même.
Voici la 1ère partie, version “édition spéciale remasteurisée”. Étonnant de découvrir ce film pour la première fois sans le ronronnement du projecteur. Le report a été fait par le biais d’un caméscope pointé sur l’écran de
projection, le son étant directement repiqué sur un ordinateur portable dans le
même temps. Puis les deux ont été calé dans un logiciel de montage. Les
musiques utilisées à l’époque ont été reprises en qualité digitale. Les points
de montage ont été affinés (le temps ayant fait son œuvre sur les collures),
l’étalonnage a été refait et des ambiances sonores ont été ajoutées pour donner
un peu de relief. Transitions et générique en plus pour dynamiser encore un peu
l’ensemble.
La deuxième et dernière partie est en cours de “rénovation” et sera bientôt disponible dans un prochain post. Je reviendrai dans le même temps sur la post-production de l’époque (doublage en roue libre et vinyles pour l’illustration sonore) ainsi que sur les scènes ratées et quelques anecdotes.
A suivre donc.
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